15 décembre 2013

Joie et émerveillement

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Passage: Luc 2:1-20
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Joie et émerveillement

Qu’est-ce qui s’est passéle 22 juillet 2013 ? La naissance du prince George d’Angleterre. Le monde entier a été fasciné par cet événement, sauf à l’église de la rue de Sèvres où 3 bébés sont nés le même jour : Mona, Soren et Jackson.

Le prince George est né dans un contexte où il y a toutes les apparences du pouvoir. Pourtant son véritable pouvoir, présent ou futur, n’est pas si évident, surtout quand on considère que la monarchie britannique est avant tout honorifique.

Le contraste avec la naissance de Jésus est total. Jésus est né dans un contexte où il n’y avaitaucune apparence de pouvoir. Et pourtant il  est le Souverain le plus puissant qui soit, celui qui a changé l’Histoire, qui existe de toute éternité et dont le règne n’a pas de fin.

Lorsque nous entendons le texte de Luc 2 qui vient d’être lu, notre réflexe c’est de se servir un vin chaud, de se mettre devant la cheminée – ou le radiateur pour la plupart d’entre nous – et d’écouter des chants de Noël de Mariah Carey.

Pourtant, je voudrais que nous fassions comme si nous entendions ce texte pour la première fois et que nous nous mettions à l’écoute de ce que Luc veut nous dire, et au-delà, bien sûr, ce que Dieu veut nous dire.

1. L’impensable abaissement

La première chose que nous devons constater, c’est le fait que Luc ancre son récit dans l’histoire. Il ne nous dit pas « il était une fois dans un Royaume très lointain, une jeune femme et son valeureux fiancé ».

Je lis au v. 1 : « En ces jours-là parut un décret de César Auguste en vue du recensement de toute la terre habitée. Ce premier recensement eut lieu pendant que Quirinius était gouverneur de Syrie. »

En lisant cet évangile et les Actes, on constate que Luc accorde beaucoup d’importance au contexte historique. Et c’est intéressant de s’en souvenir quand on aborde les éléments de surnaturel qu’on voit dans le texte. Luc nous parle un peu plus loin d’un ange qui apparaît, de Dieu qui fait resplendir sa gloire de manière visible, etc.

Devant ce genre de description, le lecteur moderne, même croyant, a parfois du mal. Parce que notre quotidien n’est pas rempli d’anges, de visions, etc. Mais à l’époque non plus, les gens ne passaient pas leur temps à voir des anges et des visions. Dans la Bible aussi, ces événements sont exceptionnels et la preuve, c’est qu’ils suscitent toujours la stupéfaction et la crainte.

Et Luc, comme le reste des auteurs du NT, nous présente ces événements surnaturels comme étant précisément l’irruption de la sphère céleste, de la réalité divine, dans le monde visible.

Luc ne nous raconte pas des légendes. Il ancre son récit dans l’histoire. Les historiens et théologiens ont quelques discussions à propos de la datation du recensement mentionné au v. 2, qui a eu lieu pendant que Quirinius était gouverneur de Syrie.

Luc semble nous donner une date différente de celle que nous donne un historien célèbre de l’époque, Flavius Josèphe. Mais il y a plusieurs explications plausibles de cette apparente contradiction et je ne m’y attarde donc pas.

On constatera simplement que Luc parle ici d’un premier recensement, et il est possible que ce soit précisément parce qu’un autre recensement allait suivre quelques années plus tard, ce qui expliquerait la différence de datation. Toujours est-il qu’à l’époque, lorsqu'il y avait un recensement, chacun devait retourner dans la ville où il était né pour se faire recenser.

Le v. 4 indique donc que Joseph, qui habitait à Nazareth en Galilée, a pris avec lui Marie, qui était enceinte suite à l’accomplissement de la promesse de Dieu, et ils se sont rendus dans la ville natale de Joseph, à Bethléhem, une petite ville de la région de Judée, près de Jérusalem. Un voyage de plusieurs jours, dangereux et épuisant, surtout avec une jeune femme en fin de grossesse.

Le temps de l’accouchement arrive et, très sobrement, Luc nous dit qu’elle « mit au monde son fils premier-né. » Elle l’a alors emmailloté comme on faisait à l’époque, pour garder le bébé fermement tenu et allongé.

Puis Luc nous indique qu’elle l’a installé dans une mangeoire, un lieu sale où on nourrissait les animaux, parce qu’il n’y avait pas de place pour eux dans la salle, c'est-à-dire sans doute une auberge.

Joseph et Marie étaient, littéralement, « sans domicile fixe ». Et ils n’ont pas trouvé d’endroit où Marie puisse accoucher convenablement. Si on n’était pas si habitués à l’histoire de Noël, on comprendrait que Luc nous dit que cet accouchement va se vivre dans des conditions de grande pauvreté et précarité.

Dieu aurait bien sûr pu faire naître son Fils dans des circonstances fastueuses, comme le prince George. Mais il a choisi de permettre que cette naissance ait lieu dans des circonstances extrêmement modestes.

J’ai pris l’exemple du prince George, c’est un peu facile, mais j’aurais pu très bien prendre un autre exemple que je connais mieux, celui de la naissance de ma fille Livia – ceux qui viennent parfois le dimanche matin la connaissent. Livia est née le 24 avril dernier, dans un hôpital parfaitement équipé à Colombes, maternité niveau 3, avec un accompagnement médical sophistiqué pour Talia, ma femme.

Comment concevoir que le Roi de l’univers, mon Seigneur et Sauveur, n’ait bénéficié d’aucun de ces égards, qu’il ait été relégué à une simple mangeoire pour animaux ? Et qu’est-ce que cela nous indique sur le Dieu de l’univers, s’il a été prêt à un tel abaissement ?

Je me demande si en choisissant de faire naître son fils dans une famille pauvre, dans une petite ville sans renommée, loin des honneurs royaux qu’il méritait, Dieu n’a pas voulu nous donner une image à notre échelle du véritable abaissement auquel il a consenti, et qui est bien plus considérable que la modestie des circonstances humaines.

Le vrai abaissement, l’impensable abaissement, c’est le fait que le Dieu de l’univers se soit fait homme pour venir nous sauver de notre égarement loin de lui.

Un cantique traditionnel, « A l’Agneau sur son Trône », exprime cette vérité ainsi : « Ô sagesse profonde, le Créateur du Monde, pour vaincre le mal triomphant s’est fait petit enfant. »

Qui peut comprendre un tel amour pour l’homme ? Une soixantaine d’années après la naissance de Jésus, l’apôtre Paul écrira ces lignes : « Lui qui était vraiment divin, il ne s’est pas prévalu d’un rang d’égalité avec Dieu mais il s’est vidé de lui-même en se faisant vraiment esclave, et devenant semblable aux humains. » (Philippiens 2.6-7)

Or Paul commence son texte par cette exhortation : « Ayez en vous les dispositions qui sont en Jésus-Christ. » Cet abaissement pour élever l’autre, cet amour qui donne et se donne, Jésus l’a vécu parfaitement, mais il appelle aussi ses disciples à suivre son exemple.

Noël est un appel à l’humilité et à la simplicité pour tous ceux qui se disent disciples de Jésus-Christ. C’est aussi pour cela, je pense, que Luc prend le soin de souligner les circonstances si humbles de la naissance du Christ.

Cette humilité, on y reviendra dans la suite du texte, mais on va avancer et passer au second point.

2. L’appel à témoins

On vient de voir le contraste entre la réalité de l’identité et de la puissance de Jésus et les circonstances de sa naissance. On constate ce même type de contraste à partir du v.8.

« Il y avait, dans cette même région, des bergers qui passaient dans les champs les veilles de la nuit pour garder leurs troupeaux. L’ange du Seigneur survint devant eux, et la gloire du Seigneur se mit à briller tout autour d’eux. »

Le métier de berger était l’un des plus courants à l’époque de Jésus, et c’était un métier modeste. Les bergers ne sont pas nommés, ce sont simplement des travailleurs modestes des environs de Bethléhem. Mais dans la soirée ordinaire de ces « Monsieur-Tout-le-Monde », l’extraordinaire survient.

L’ange du Seigneur, nous dit le v. 9, « survint devant eux, et la gloire du Seigneur se mit à briller tout autour d’eux. »

Dieu lui-même fait briller sa gloire – On se sait pas exactement à quoi cette vision a ressemblé –et un envoyé céleste s’adresse aux bergers. Pas étonnant qu’ils aient été « saisis d’une grande crainte » (v. 9) !

Je ne sais pas si vous avez déjà ressenti de la crainte devant un puissant phénomène naturel ; ou devant l’immensité de la création à côté de laquelle nous sommes si petits. Une amie me parlait il y a plusieurs années d’une tornade qui était passée tout près de chez elle aux Etats-Unis, et elle me disait qu’en voyant cette tornade, elle ne pouvait pas s’empêcher de penser à la puissance de Dieu.

D'ailleurs, vous avez peut-être vu cette vidéo sur YouTube, récemment, où un jeune homme filme une tornade dans son village et commence à réciter le Notre Père.

C’est un réflexe devant ce qui nous domine, ce qui nous échappe. Et s’il y en a bien un que nous ne pourrons jamais maîtriser, c’est Celui qui nous maîtrise, notre Créateur, Dieu.

Lorsque l’ange apparaît aux bergers, et plus encore lorsque c’est une « multitude de l’armée céleste » qui leur apparaît (v. 13), on doit se représenter quelque chose de bien plus frappant encore. Le ciel s’ouvre devant ces modestes hommes et leur Créateur leur donne un aperçu de sa gloire céleste.

Mais ce qui doit également nous frapper ici, c’est que les bergers sont les premiers à entendre la « bonne nouvelle ». Cette intervention décisive de Dieu, qu’avaient annoncé les prophètes de l’Ancien Testament, elle est en train de se dérouler.

Le prophète Michée, entre autres, en avait parlé de façon étonnamment précise, sept siècles à l’avance : « Et toi, Bethléem (…) qui es petite parmi les villes de Juda, de toi sortira pour moi celui qui dominera sur Israël, et dont l’origine remonte loin dans le passé, à l’éternité. » (Michée 5.1)

Cette prophétie est en train de se réaliser ! Or Dieu n’envoie pas son ange s’adresser au roi Hérode ou à l’Empereur romain, il se présente devant de simples bergers. Et même si ce n’est pas dit explicitement, une lecture attentive nous montre que Dieu a voulu faire de ces bergers des témoins.

Dès le v. 10, l’ange précise qu’il n’est pas en train de leur donner une info « exclusive » qu’ils garderont pour eux ; cette bonne nouvelle est « pour tout le peuple. »

Ensuite, il  leur donne « un signe », v. 12, c'est-à-dire une marque d’authenticité de l’annonce qu’il est en train de faire. « Vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. »

Puis, au v. 14, une multitude céleste apparaît et annonce la « paix parmi les humains en qui Dieu prend plaisir ! » La bonne nouvelle s’adresse à l’humanité ; et ces modestes bergers vont devenir les premiers à être porte-paroles de la venue du Messie.

On retrouve dans cette scène plusieurs reflets de textes de l’Ancien Testament, notamment ce texte du prophète Esaïe (40.9-11) : « Élève ta voix avec force, Jérusalem, toi qui portes la bonne nouvelle ; élève ta voix, n’aie pas peur, dis aux villes de Juda : votre Dieu est là ! Le Seigneur Dieu vient avec force. (…) Comme un berger, il fera paître son troupeau, de son bras il rassemblera des agneaux et les portera sur son sein ; il conduira les brebis qui allaitent. »

Est-ce une coïncidence si Dieu a choisi des bergers pour annoncer sa bonne nouvelle ?

L’image du berger est l’une des plus courantes, dans la Bible, pour représenter Dieu lui-même, qui prend soin de son peuple comme un berger prend soin de ses brebis.

Or la naissance de Jésus, c’est la pleine réalisation de cette proclamation qu’on trouve chez Esaïe : « Votre Dieu est là ! »

Et Jésus lui-même, une trentaine d’années plus tard, se présentera comme le bon berger des brebis, celui qui vient trouver son peuple et qui le ramène à sa demeure. L’ange va donc trouver des bergers pour leur annoncer la naissance du Bon Berger, et pour qu’eux-mêmes annoncent la nouvelle dans la région. Et dans la suite du texte, on voit qu’ils ont parfaitement compris leur mission.

v. 15 « Allons donc jusqu'à Bethléem, et voyons ce qui est arrivé, ce que le Seigneur nous afait connaître. »

v. 17 : « Après l’avoir vu, ils firent connaître ce qui leur avait été dit au sujet de cet enfant. »

Dieu a confié à des hommes humbles et simples une bonne nouvelle qui s’adresse à toute l’humanité. Et c’est notre vocation aujourd'hui encore. En tant que disciples de Jésus-Christ, nous pouvons nous sentir bien seuls et isolés face à une majorité de personnes autour de nous qui estiment que Jésus-Christ n’a rien à voir avec leur quotidien, qui poursuivent leur vie sans savoir, ou sans vouloir savoir, que « notre Dieu est là », or il est intervenu dans la personne de Jésus-Christ, dans le monde, dans l’histoire, et il appelle ceux qui ont cru à cette intervention à l’annoncer à l’humanité, qui a désespérément besoin de l’entendre.

A Noël, on se retrouve souvent en famille, entre proches. Et c’est une belle chose. Mais nous ne devrions pas oublier que Noël est avant tout fondé sur une bonne nouvelle que nous sommes appelés à proclamer, à transmettre.

Et je voudrais souligner que nous avons une occasion unique de le faire, ce mardi, à 19h30, devant la gare Montparnasse. C’est un rendez-vous exceptionnel pour Noël où nous aurons l’occasion, comme les bergers, d’annoncer la venue de Dieu dans le monde, par des chants de Noël, par la distribution d’évangiles et de Bibles, et de boissons et cookies.

Et je n’ai pas peur d’encourager tous ceux ici qui ont à cœur d’annoncer cette bonne nouvelle et qui n’ont pas d’empêchement mardi soir de se joindre à nous. Le dernier point que je voudrais relever dans notre texte, c’est un appel à la louange.

3. Un appel à la louange

J’ai rappelé tout à l’heure que ce récit n’est pas le conte de fées qu’on pense. On parle rarement de ce voyage épuisant de plusieurs jours pour aller de Nazareth à Bethléem.

De cette recherche sans doute très stressante et angoissée d’un lieu pour que Marie puisse accoucher. On parle rarement de la souffrance de Marie, de son épuisement, peut-être de sa crainte pour sa vie et celle de son enfant. Pourtant, l’accent premier de Luc lorsqu'il nous raconte la naissance de Jésus, c’est d’abord la joie.

Et ce qui est frappant, c’est que c’est d’abord la joie céleste, la joie de Dieu, qui est exprimée par les anges. v. 10 « Je vous annonce la bonne nouvelle d’une grande joie qui sera pour tout le peuple. » C’est comme si les anges invitaient les bergers à une joie qui leur était encore étrangère.

Rappelons que les bergers ne connaissent pas Marie et Joseph et qu’ils n’ont pas particulièrement de raison de s’en réjouir. Mais les anges leur annoncent la naissance d’unsauveur, qui est « le Christ », c’est-à-dire le Messie, et le Seigneur, c'est-à-dire le vrai et grand roi de Dieu.

Et cette annonce est suivi de paroles de louange adressées à Dieu : v. 14 « Gloire à Dieu dans les lieux très hauts, et, sur la terre, paix parmi les humains en qui il prend plaisir. »

La louange, fondamentalement, c’est l’expression spontanée de la joie et de l’admiration. A petite échelle, c’est ce que les gens ressentent, par exemple, lorsqu'ils vont à un concert et acclament les artistes, surtout si ce sont des artistes célèbres qu’ils admirent. Ou encore lorsqu'un supporteur de foot s’exclame devant un superbe but marqué par son équipe.

Il y a un mélange de joie, d’admiration, et spontanément, on a envie de l’exprimer. Mais si l’être humain a ce réflexe naturel de la louange devant ce qu’il admire, c’est parce qu’il a été créé pour louer Dieu.

Dans notre texte, même si on ne peut pas connaître la vie intérieure des anges, on peut penser que dans leur louange, il y a avant tout un émerveillement et une joie spontanées devant la plus grande des bonnes nouvelles. Dans un monde tragique et déchiré, Dieu est intervenu et a envoyé un Sauveur divin, qui s’est abaissé jusqu'à venir dans notre dimension humaine, et qui a poursuivi cet abaissement jusqu'à la mort sur la croix à notre place, pour payer la peine que méritait notre rébellion contre Dieu.

Les bergers ne savaient pas encore tout cela, bien sûr. Mais par l’intermédiaire des anges, Dieu les invite à se réjouir. Et la joie la plus profonde que puisse connaître un être humain, c’est celle qu’il ressent et exprime lorsqu'il prend conscience d’être connu et aimé de son Créateur.

Dieu s’est révélé aux bergers non seulement pour qu’ils annoncent la bonne nouvelle, mais aussi pour que cette bonne nouvelle remplisse leur cœur et qu’elle s’exprime dans une louange spontanée.

Je ne sais pas quel Noël vous allez vivre cette année. Pour certains, peut-être que ce sera des moments mémorables en famille ou avec des proches. Pour d’autres, peut-être qu’il y aura plus de solitude, ou de tristesse face à des difficultés familiales ou personnelles. Mais la joie de Noël c’est précisément cet émerveillement que nous ressentons lorsque nous comprenons que nous sommes connus et aimés par le Créateur de l’univers.

Et si Dieu a voulu que le message transmis parles bergers de Judée viennent jusqu'à nous, c’est parce qu’il a voulu nous faire connaître la joie la plus magnifique qui soit.

Amen.

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